« Tout est en un. Tout est amour. Tout est économique. Tout est sexuel. Tout est relatif. Et ensuite ? » Bernard Werber

Tout est calcul.

Tahuir a compris depuis bien longtemps comment fonctionner le monde de la mode. Elle est telle un vampire qui suce, jusqu'à la dernière goutte de sang, la créativité. Elle l'épuise à chaque seconde de sa vie ; elle voue son existence entière à son métier et n'a de cesse de pourchasser ses rêves. Et ce, sans jamais fatiguer. Elle mange des heures entières de sommeil pour acquérir plus de compétences, pour en savoir plus sur le monde d'avant, sur celui qui l'entoure déjà et sur comment manier ses mains tout comme son imagination débordante. Car l'âme d'un créateur perdure dans ses créations ; l'art est éternel.

Et pourtant… Et pourtant, aussi contradictoire soit-il, elle ne sait pas contrôler ses émotions. Elle est la passion à fortes doses. Elle est une véritable œuvre d'envergure, jusqu'à son corps qui est sculpté comme une déesse grecque. Si bien qu'on offrirait presque du déodorant à la Vénus, en comparaison. Elle ne laisse jamais ses sentiments, ses émotions au fond d'elle et explose à chaque seconde de sa vie. Elle tire ses paroles, aussi violentes et puissantes que des balles de fusil, sur les autres lorsqu'on l'énerve. Elle libère toute sa frustration, toute ce qui la rend incertaine ou mal à l'aise dans sa peau, sans gêne. Elle crache, vocifère quand quelque chose l'irrite. Et, elle n'en jamais eu honte. C'est ce qui fait d'elle un personnage à la fois si impulsif, au final, et si attachant.

Et alors, cette partie d'elle va dans la continuité de son caractère de meneuse. C'est à la fois un côté bestial et un instinct presque animal qui lui confère ce charisme, cette intrépidité, ce pouvoir, cette aura de puissance naturelle.
Tahuir est imposante de part le fait qu'elle soit une leader née pour cela. Elle est née, a été façonnée pour plaire et être regardé. Elle est le beau sexe incarnée. Elle donne envie d'être écoutée et respectée.
La beauté, comme bien des choses, n'est pas un cadeau des dieux. Entre les mains des bonnes personnes, elle est une arme redoutable. Mais, à double tranchant.

Et puis, cette fleur blonde est aussi un véritable ange vivant. Son cœur déborde d'une compassion que peu d'entre nous serait capable de ressentir. Mais pourtant, la beauté même de ce qu'elle est réellement, elle le cache au plus profond d'elle. Et c'est peut-être bien l'une des choses les plus tristes que l'on peut voir. Ce n'est pas un refus, mais c'est plutôt le côté rationnel de sa personne qui lui rappelle la réalité. Elle vit dans une société où elle aime s'y épanouir, elle aime ce système, elle aime la façon dont son univers tourne. Mais le monde est fait de contradiction et il y a à la fois une petite voix qui aurait peut-être préféré la miséricorde des dieux envers ce peuple. Et malheureusement, ce n'est pas de l'hypocrisie. Simplement un fait qui ne changera pas pour autant sa façon d'agir.

Enfin… pour ainsi dire, Tahuir est comme tout le monde mais n'est pas n'importe qui.  

Il y a trois vérités dans le monde dont je suis certaine.

« Les maîtres sont l'espèce gouvernante. »

Dit la mère.

« Remercions le passé pour profiter du présent. »

Dit le père.

« Tu es profondément douée, Tahuir. »

Dit le monde.

 

On ne choisit pas où l'on naît. On ne choisit pas sa famille. Alors, on naît tous inégaux.
Moi, j'ai grandi dans la richesse et dans la prospérité. Moi, j'ai vécu dans la douceur de la vie. Moi, j'ignore ce qu'est la souffrance.

Et pourtant, quand bien même le monde me destinait à une vie de quiétude absolue, je n'en avais pas décidé ainsi. Ma soif de savoir me porta au sommet ; l'Histoire m'apprit ce que la richesse de ma famille n'aurait pu m'enseigner en toute une vie ; Elle m'apprit ce qu'était la passion.
Je me souviens un jour, mon père était revenu d'un long voyage. Les chiens ne font pas des chats, n'est-ce pas ? Il m'avait rapporté une petite boîte, où, à l'intérieur se trouvait des objets de l'ancien temps. Sans même le savoir à l'époque, ces reliques furent l'avènement de ma destinée, ce qui fit de moi l'étoile montante de la mode de cette décennie.

Malgré tout, il serait fou de croire une seule seconde que mon seul talent en serait le résultat, car la vérité est toujours teintée. Le travail, bien entendu ! C'est des heures et des heures coincées entre l'irréel et le réel. Les dieux m'ont offert la capacité d'utiliser mon monde à la manière des véritables créateurs ; à leur image.
Ainsi, lorsque mon temps s'écoule, l'Égypte dort. On assiste alors à ce que l'on appelle une illusion parfaite. Car quand bien même cet univers-là m’offrirait une éternité dans la fleur de l'âge, il n'en reste pas moins qu'une illusion, aussi belle soit-elle. Et il faut parfois savoir différencier l'irréel du réel pour garder un pied sur Terre ; voilà de quelle couleur se teinte ma vie. Mais, l'illusion dure une éternité. La désillusion, un instant. Bien sûr qu'il y avait une vie après ! Mais, certains mensonges devraient laisser place aux autres. Car, tout n'est pas faux, certes ; les choses essentielles sont vraies ; celles les moins importants ne le sont simplement pas forcément.
La réalité est là. Nos sens sont tous différents, et personne ne percevra rien pareil. La vie serait alors qu'une image fausse. Mais cela n'empêche personne pour autant d'aimer, d'être la passion.
La perfection n'a rien de beau ; la véritable met en valeur les qualités grâce aux défauts.
 

L'Histoire a éliminé le passé des peuples pour mieux contrôler notre présent, notre futur.

Tahuir est un personnage rempli de nuances. Il y a bien des choses qu'elle comprend, qu'elle voit, mais ces choses-là, elle ne les considère pas. Elle ferme les yeux devant la réalité, préférant détourner le regard plutôt que de devoir changer son mode de vie. On pourrait croire à une forme d'égoïsme, il est vrai, mais il n'en est rien. Car Tahuir est une femme remplie de bonté au fond d'elle. La seule différence, c'est que ce mot a de trop nombreuses significations selon les périodes de l'Histoire.
Les Hommes sont mus d'une soif de pouvoir, ils ont été façonnés pour être attiré par la puissance. Chaque société a son paria, depuis la nuit des temps. La jouvencelle est instruit, très instruit. Elle a cette même soif de pouvoir que ses confrères, mais elle est plutôt dirigée vers le savoir, contrairement à certains. Elle n'est pas différente des autres. Elle est l'un des beaux rouages de la société et ne se détourne jamais du chemin qu'elle lui a tracé. Alors, oui, elle accepte certaines choses qu'elle ne comprend pas complètement pour autant. Certaines fois, il lui arrive de hausser un sourcil, mais elle cille jamais.
Jamais.

Et alors, lorsque ces certaines choses touchent son cœur, elle s'en remet aux dieux. Car ils lui permettent d'effacer les erreurs de calcul de son cerveau. Cette compassion qui n'a pas lieu d'être.
Elle s'en remet à eux, comme s'ils étaient capables de lui expliquer ce sentiment. Elle voue un amour inconditionnel pour eux, car ils sont sa bouée de sauvetage. Elle ferme les yeux, prie, et quand elle les rouvre, elle a ce même regard qui montre que son esprit s'est vidé de toutes ces idioties. Elle leur a même dédié une place spéciale sur son corps, un tatouage recouvrant le haut de son dos jusqu'à la naissance de sa nuque. Ces dessins, ces ornements révèlent toute la subtilité de cet amour qu'on aurait dit malsain.    
Elle leur est dévoué jusqu'à la mort.